Des soins même sans affiliation à la Sécurité sociale
Pour lever les freins qui empêchent de se soigner, les permanences d’accès aux soins de santé (PASS) sont déployées au sein des hôpitaux. Elles facilitent l’accès des personnes démunies, avec ou sans papiers, au système hospitalier, aux réseaux de soins et d’accompagnement social. « Lorsque les personnes viennent à l’hôpital, ce n’est pas pour réclamer l’ouverture de droits, dont elles ne connaissent parfois même pas l’existence, mais parce qu’elles ont besoin de soins. » Responsable du service social à l’hôpital Delafontaine, à Saint-Denis (93), Caroline Barbereau est bien placée pour le savoir. Le centre hospitalier de Seine-Saint-Denis est le seul établissement de santé public pour tout le territoire de Plaine-Commune, qui compte 435 000 habitants au nord de Paris, dans un département où la précarité est la plus élevée de France. 17,5 % de la population y vit en dessous du seuil de pauvreté, selon l’observatoire des inégalités. Et souvent sans couverture de sécurité sociale. Démarches administratives trop compliquées, migration sans titre de séjour, barrière de la langue sont autant de freins. Résultat : sur 50 000 passages annuels environ aux urgences de l’hôpital Delafontaine, « 20 % des personnes n’ont aucune couverture sociale », d’après Caroline Barbereau. Un tiers des femmes qui accouchent à la maternité sont aussi dans ce cas.
Travailleurs sociaux et médecins travaillent ensemble
Dans certains hôpitaux, c’est un service dédié, où médecin(s) et travailleur social travaillent en binôme, qui assure cette permanence d’accès aux soins. Selon les endroits, elle est parfois réservée aux plus de 16 ans. A l’hôpital Delafontaine, le dispositif est accessible quel que soit l’âge. Il s’est doté d’une organisation particulière : pour une consultation de médecine générale, deux matinées de consultations, sur rendez-vous, sont dédiées à la PASS. Si l’on veut voir un spécialiste, il suffit de prendre rendez-vous auprès du service de consultation spécialisée concerné. Dans tous les cas, il faut aussi prendre rendez-vous avec le service social de l’hôpital, qui centralise tous les circuits de prise en charge. Les 27 assistantes sociales qui y travaillent ne sont pas de trop pour aider les patients à rattraper leurs droits. C’est la garantie de pouvoir accéder aux soins et à un suivi médical quand on en a besoin, que ce soit en consultation externe à l’hôpital ou à l’extérieur. Le service ne désemplit pas. Il accompagne environ 6000 patients par an dont la moitié relève de la PASS.
Remplir les dossiers de demande d’Aide médicale d’État
Parmi les personnes accompagnées par la PASS, les 3/4 relèvent de l’Aide médicale d’État (AME), qui permet un accès aux soins aux étrangers séjournant en France en situation irrégulière (renvoi au dossier AME à venir). Pour une première demande d’AME, la personne doit en principe se présenter en personne (et depuis le Covid, sur rendez-vous) à la sécurité sociale. « Mais à Delafontaine, nous avons une dérogation pour les déposer pour eux. », témoigne Caroline Barbereau. Une aide précieuse pour comprendre les subtilités du dispositif et constituer les dossiers : « le plus difficile est de rassembler les documents nécessaires, si les personnes les ont. » Prouver sa présence en France depuis trois mois, par une facture, n’est pas forcément simple : « la majorité n’a pas de logement, est hébergée chez un tiers ou dans une structure. Pouvoir payer 4 € pour des photos d’identité n’est pas évident pour tout le monde non plus. » Du coup, certains renoncent. « Il nous faut beaucoup de pédagogie pour expliquer l’intérêt de monter un dossier pour ouvrir des droits à la sécurité sociale : ça ne sert pas à toucher de l’argent, mais évite de recevoir une facture, quand on a besoin d’examens ou de médicaments », explique la responsable du service social de l’Hôpital Delafontaine.